Vous avez sûrement déjà vu cet immense meuble en bois, généralement installé dans le chœur de l'église (ou parfois dans les chapelles), juste derrière l'autel.
Mais à quoi servait il ? Et pourquoi est-il si grand ? et souvent si décoré ?
Direction quelques églises aveyronnaises pour chercher la réponse !
Le retable de Comps-la-Grandville (initialement à l'abbaye de Bonnecombe)
Ce grand meuble est appelé "retable", du latin "retro tabula" qui signifie derrière la table (ou l'autel). Jusqu'en 1963 et une importante réforme de l'Eglise (concile Vatican II pour les connaisseurs), le prêtre tournait le dos aux fidèles et se tenait face à l'autel. Le retable permettait de poser des objets utilisés lors de la messe. Il était donc contre le mur.
Ce meuble servait également d'écrin au petit coffret (tabernacle) qui contenait les hosties et le calice utilisés pendant la messe. Les hosties et le vin (symbolisé par le calice) sont partagés et mangés lors de la messe.
Utilisés depuis le Moyen Age, les retables et tabernacles sont devenus massifs aux XVIIe et XVIIIe siècles afin de répondre à la propagande de l'Eglise. Pourquoi ? 🤔 Voyons cela plus en détail !
Le retable et le tabernacle (en photo ci-dessus) de Brousse-le-Château ont été réalisés en 1769 sur commande de monseigneur Louis-André de Gimaldi, curé de la la paroisse.
Au XVIe siecle, l'Église doit faire face à un important mouvement de contestation appelé la Réforme protestante. Celle-ci reproche notamment à l'Église sa richesse et son faste. Elle rejette plusieurs croyances catholiques comme le culte des saints ou la Transsubstantiation (le fait que le pain et le vin deviennent le corps et le sang du Christ). Pour contrer le mouvement et reconquérir des fidèles, l'Église met en avant tout ce que les protestants rejettent et développe un art au service de sa Contre-Reforme : c'est l'art baroque.
La puissance (et la richesse) de l'Église se manifeste dans les retables, particulièrement imposants et majestueux de manière à être vus de tous et frapper les esprits.
On retrouve dans le décor de nombreuses représentations de saints. Ainsi, sur celui de Brousse-le-Château, on peut notamment voir saint Jacques-le-Majeur à qui est dédiée l'église). Sur le second retable, conservé dans la chapelle sud, on peut reconnaître un évêque, sans doute saint Amans, premier évêque de l'Aveyron et saint protecteur du Rouergue.
Le tabernacle est au cœur du retable car il représente la Transsubstantiation à travers les hosties et le calice contenant le vin. On trouve souvent représenté sur la porte un pélican nourrissant ses petits ou un agneau (symboles du sacrifice du Christ).
Pourquoi trouve-t-on souvent une représentation de pélican sur les tabernacles baroques (comme ici à Carcenac-Salmiech ? En y regardant de plus près, vous pouvez remarquer que le pélican est en train de nourrir ses petits. Le cou penché sur sa poitrine, il se perce celle-ci pour les nourrir de son cœur et de son sang. Cette légende a été reprise par l’Église pour symboliser l'amour du Christ pour les hommes. À l'image du pélican, Jésus donne son corps et son sang pour sauver les Hommes.
Bien que les retables soient différents selon les sculpteurs et les régions, des éléments communs se retrouvent :
- une structure symétrique en deux ou trois panneaux (ditptyque ou triptyque), comme sur ces deux retables de Carcenac-Salmiech et Comps-la-Grandville ( ci-dessous) qui possède trois travées horizontales et trois travées verticales, la travée centrale étant occupée par un tableau dont l'iconographie est liée à la vie du Christ (c'est souvent une Crucifixion).
Les trois panneaux reposent sur un soubassement et sont surmontés d'un couronnement.
- Le décor foisonnant : corbeilles de fruits, cornes d'abondance, conques (attention, la conque est un décor en vogue au XVIIe siècle et pas nécessaire liée aux chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle...), angelots, pots à feu... Les colonnes torses sont très appréciées, de même que les décors de faux marbre.
- les retables sont généralement en bois polychrome et doré à la feuille d'or.
les-retables-baroques
De gauche à droite : 1 à 4 - retable de Comps-la-Grandville ; 5 - chapelle des Pénitents, Villefranche-de-Rouergue ; 6 et 7 - Carcenac-Salmiech
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Maintenant que vous en savez plus sur les retables, à vous de redonner à ces deux magnifiques meubles baroques leurs couleurs ! Cliquez sur l'image de votre choix pour la télécharger.
Pour poursuivre vos découverte :
Brousse-le-Château, c'est par ici
La Vierge de Pitié de Carcenac-Salmiech, c'est par là
La chapelle des Pénitents (Villefranche-de-Rouergue), sur le site de l'office de tourisme
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